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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/487

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monument qui ait jamais été fait en ce genre. En effet, les figures des histoires de saint François sont exécutées avec une telle perfection que l’on ne peut rien demander de plus au marbre. Benedetto y représenta des arbres, des rochers, des édifices, des perspectives ; on voit encore au pied de la chaire son rabattement par terre sous forme de pierre tombale ; le tout fait avec un dessin qu’on ne saurait assez louer. On dit que dans ce travail il eut quelques difficultés avec les fabriciens de Santa Croce, parce que, comme il voulait appuyer sa chaise à une colonne qui reçoit plusieurs arcs de support du toit et percer cette colonne pour y pratiquer l’entrée et l’escalier de la chaire, ceux-ci refusèrent craignant que la colonne ainsi affaiblie par le vide de l’escalier ne pût résister au poids qui la surchargeait et n’entraînât la ruine d’une partie de l’église. Mais comme Mellini leur assura que l’ouvrage se terminerait sans danger pour l’église, ils furent finalement contents. En effet, après avoir extérieurement armé de liens en bronze la colonne, c’est-à-dire la partie qui de la chaire jusqu’en bas est recouverte de pierre forte, Benedetto pratiqua intérieurement l’escalier pour monter à la chaire, et autant il évida la colonne à l’intérieur, autant il la renforça à l’extérieur dans la manière où on la voit à présent.

Plusieurs affirment que Filippo Strozzi l’ancien, voulant faire construire son palais, s’en ouvrit à Benedetto qui lui fit un modelé d’après lequel on commença la construction, mais qui fut terminée par le Cronaca, après la mort de Benedetto. Celui-ci, ayant amassé de quoi vivre, ne voulut plus entreprendre aucun travail en marbre. Il termina, seulement, à Santa Trinità, la sainte Marie-Madeleine[1], commencée par Desiderio da Settignano et fit le Crucifix[2] qui est sur l’autel de Santa Maria del Fiore, ainsi que d’autres analogues. Quant à l’architecture, bien qu’il ait mis la main à peu d’œuvres, il y montra néanmoins autant de jugement de cet art qu’en sculpture, particulièrement dans les trois somptueux plafonds qui furent faits, d’après ses dessins et sur ses conseils, dans le palais de la Seigneurie de Florence[3]. Le premier est celui de la salle connue, aujourd’hui, sous le nom de Salle des Deux-Cents et au-dessus de laquelle il s’agissait de disposer non une salle semblable, mais deux chambres, dont l’une, destinée aux audiences, devait être séparée de l’autre par un mur solide percé d’une porte en marbre. Benedetto, pour ne pas diminuer la hauteur de la Salle des

  1. Existe encore.
  2. En bois ; en place.
  3. Ces travaux, commandés le 12 juin 1473, furent faits par Giuliano da Maiano et le Francione.