Page:Lesage - Histoire de Gil Blas de Santillane, 1920, tome 2.djvu/270

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avec son père et son épouse, et que la cérémonie de mon mariage se ferait le jour suivant par le grand vicaire de Valence. Véritablement, don César, son fils et Séraphine ne manquèrent pas de se rendre à mon château avec cet ecclésiastique, tous quatre dans un carrosse à six chevaux, précédé d’un autre à quatre où étaient les femmes de Séraphine, et suivi des gardes du gouverneur.

Mme  la gouvernante fut à peine arrivée au château qu’elle témoigna une extrême impatience de voir Antonia, qui, de son côté, ne sut pas plutôt la venue de Séraphine, qu’elle accourut pour la saluer et lui baiser la main ; ce qu’elle fit de si bonne grâce que toute la compagnie l’admira. Eh bien ! Madame, dit don César à sa belle-fille, que pensez-vous d’Antonia ? Santillane pouvait-il faire un meilleur choix ? Non, répondit Séraphine ; ils sont tous deux dignes l’un de l’autre ; je ne doute pas que leur union ne soit très heureuse. Enfin chacun donna des louanges à ma future ; et, si on la loua fort sous son habit de serge, on en fut encore plus charmé lorsqu’elle parut sous un plus riche habillement. Il semblait qu’elle n’en eût jamais porté d’autres, tant son air était noble et son action aisée !

Le moment où je devais, par un doux hymen, voir attaché mon sort au sien étant arrivé, don Alphonse me prit par la main pour me conduire à l’autel, et Séraphine fit le même honneur à la mariée. Nous nous rendîmes tous deux dans cet ordre à la chapelle du hameau, où le grand vicaire nous attendait pour nous marier ; cette cérémonie se fit aux acclamations des habitants de Lirias et de tous les riches laboureurs des environs, que Basile avait invités aux noces d’Antonia. Ils avaient avec eux leurs filles, qui s’étaient parées de rubans et de fleurs, et qui tenaient dans leurs mains des tambours de basque. Nous retournâmes ensuite au château, où, par les soins de Scipion, l’ordonnateur du festin, il se trouva trois tables dressées, l’une pour