nité habituelle ; sa belle tête se releva et reprit sa fière attitude et de ses lèvres sortit un son qui ressemblait beaucoup à un rire espiègle.
« Je suis fâchée d’avoir offensé le vieux Batoche, murmura-t-elle, en pliant le papier qu’elle cacha dans son sein ; il aurait été précisément l’homme qu’il m’eût fallu. »
Elle avait à peine prononcé ces mots, que son père entra et dit :
« Batoche demande à vous voir, ma chère. »
V
zulma et batoche.
Le vieux soldat parut aussitôt. Il tenait à la main son bonnet de fourrure, baissait la tête et semblait un peu déconcerté.
— Vous êtes revenu, Batoche, dit Zulma en se levant et en s’avançant vers lui.
— Je suis revenu, Mademoiselle.
— Vous n’êtes pas fâché contre moi, alors ?
— Mademoiselle !
— Batoche, je suis enchanté de vous revoir.
Le vieillard leva les yeux et ayant acquis, d’un coup d’œil, la conviction que ce bon accueil était sincère, dit :
— J’avais déjà parcouru près de deux milles, songeant à tout ce que vous m’avez dit et oubliant tout le reste. Tout à coup, je me rappelai quelque chose ; je m’arrêtai ; je réfléchis ; je revins aussitôt sur mes pas, et me voici.
Zulma éclata de rire.
— Que vous êtes-vous rappelé, Batoche ?
— Que vous pourriez désirer envoyer une réponse à la lettre que j’ai apportée. Veuillez m’excuser, Mademoiselle, j’ai été jeune un jour ; je sais ce que sont les jeunes filles.
Et ses petits yeux gris clignotèrent.
Zulma mit la main sur son épaule et d’un air moitié sérieux moitié badin, répliqua :
— On vous appelle sorcier, Batoche. Comment avez-vous pu deviner ainsi mes pensées ? Écoutez. Il y a une heure que vous m’avez quittée ; durant ce temps, j’ai été occupée à lire la lettre et à réfléchir sur son contenu. J’ai fini par me décider à y répondre immédiatement. Mais où prendre un messager ? Je pensais à vous et j’exprimais mon regret de votre départ, quand on vous a annoncé.
La figure de Batoche s’illumina de plaisir. Non seulement il était satisfait du résultat de sa sagacité, mais il ressentait la plus