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les bastonnais

— En réalité, continua le jeune officier, Votre Excellence m’excusera si j’affirme que, d’après tous les renseignements que j’ai obtenus, et sur lesquels je vous assure de nouveau que vous pouvez compter, il est évident que la population des régions que la colonne d’invasion a traversées ou traverse en ce moment, est favorable à la cause américaine.

Une proclamation trompeuse écrite par le général Washington lui-même et traduite en français a été distribuée parmi cette population, qui a été séduite par les belles phrases qu’elle renferme sur la liberté et l’indépendance. C’est ce qui explique tous les rapports faux et illusoires que nous avons reçus jusqu’ici concernant cette expédition.

Nous avons été systématiquement et à dessein tenus dans les ténèbres sur ce sujet. Laissée à elle-même, l’armée d’Arnold, disloquée par l’insubordination, se serait débandée ou aurait péri de faim et de misère dans les régions inhabitées. Encouragée et ravitaillée par les propres sujets de Sa Majesté, elle marche maintenant en bataillons serrés sur Québec.

— Les traîtres des districts éloignés ne peuvent pas, malheureusement, être atteints aussi facilement que ceux qui sont sous nos yeux ; mais l’heure de leur châtiment arrivera pourtant. En attendant, il nous faut surveiller attentivement la désaffection et la trahison dans les murs mêmes de cette ville, dit le lieutenant-gouverneur d’un ton énergique et avec une chaleur très perceptible.

— Ce paquet pourra probablement aider Votre Excellence en cela, répliqua Hardinge, tout en remettant au représentant de la couronne anglaise le reste du paquet qu’il avait reçu de Donald.

— Qu’est-ce que ceci, demanda le gouverneur, en déliant les cordons qui entouraient le paquet ?

— Des lettres du colonel Arnold au général Schuyler qui était le commandant en chef de l’armée d’invasion aux débuts de l’expédition.

Arnold sera surpris, sinon chagriné, d’apprendre que Montgomery a succédé à Schuyler.

— Ah ! je vois. Eh bien, comme ces lettres ne sont pas adressées au général Montgomery et que le général Schuyler a quitté le pays, nous ne manquerons pas à l’étiquette en les ouvrant. Elles sont sans doute d’une lecture fort intéressante. Et celles-ci ?

— Ce sont des lettres d’Arnold à plusieurs citoyens distingués de Québec.

— Impossible !

— Veuillez lire les adresses.