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les bastonnais

dans quelque chose tout à fait différent et bien au-dessus de sa gratitude pour les bons soins qu’elle lui avait donnés, du sentiment de reconnaissance qu’il lui devait pour lui avoir sauvé la vie, dette qu’il reconnaissait ne pouvoir jamais acquitter. Dans ces longs après-midis, au milieu de la demi-obscurité entretenue par les rideaux dans la chambre du malade, pendant ces nuits bien plus longues encore, passées sans sommeil dans le silence, et sans autres communications avec la jeune fille que par les yeux ; dans ces fréquentes conversations composées pour la plu­part de lieux communs, mais relevées parfois par d’impétueuses révélations du cœur ; dans ces visions brèves, mais assez fréquentes de la beauté de Pauline, produites par quelque mouvement gracieux et soudain de son corps, ou lorsqu’elle lui apparaissait sous quelque favorable effet de lumière ; dans ces éclairs intuitifs de son vrai caractère rendu double­ment attrayant par son élément de tristesse constante, et le soupçon de son abnégation, Cary avait inconsciemment enroulé une chaîne autour de son cœur, chaîne dont il