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les bastonnais

LIVRE II

LES NUAGES S’ÉPAISSISSENT.

I
zulma sarpy.

La matinée était humide et sombre, et la neige tombait à gros flocons. Zulma Sarpy était assise dans sa chambre à coucher, étendue avec indolence sur une chaise à bascule devant un feu vif. Elle était vêtue d’une robe blanche de matin ou peignoir légère­ment déboutonné au collet, révélant ainsi les richesses d’une gorge de neige, tandis que le bord négligemment relevé laissait voir deux beaux pieds chaus­sés de pantoufles et disparaissant à moi­tié dans la peluche d’un coussin écar­late. Sa luxuriante chevelure blonde rejetée en bandeaux d’or au-dessus du front et derrière les oreilles roses, était rassemblée en grosses torsades négligemment fixées derrière la tête et retenues en position par un grand peigne d’écaille. Ses deux bras étaient levés au niveau de sa tête et ses deux mains tenaient languissamment les poignées d’ivoire qui couronnaient le dossier de la chaise. Au second doigt de la main gauche brillait un anneau dont le diamant resplendissait comme une étoile.

Toute la posture de la gracieuse nonchalante mettait en relief un buste d’un modèle irréprochable.

Auprès d’elle était un petit guéridon de forme ronde supporté sur trois pieds sculptés avec un art exquis et couvert d’une magnifique dentelle cramoisie, sur laquelle était un livre ouvert avec quelques menus objets de toilette féminine. Ce guéridon donne