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− XII −

lors, les imaginations sont en campagne. Par une indiscrétion dont nous ne nous expliquons pas le but, ce bordereau est publié avec force insinuations malveillantes pour le chargé d’affaires, par un petit journal financier édité à Bruxelles, lequel passait, à tort ou à raison, pour être l'organe sinon officiel, du moins officieux, du gouvernement provisoire. Cet article est reproduit in extenso dans les journaux haïtiens. Le ministère voit tout, entend tout. Pour dissiper les incertitudes, redresser l’opinion prête à s’égarer, déjouer la malveillance, il avait peu de chose à faire : rendre public le compte qu’il avait reçu de l’emploi des 4 millions par le chargé d’affaires, en vertu d’ordres et de traites du gouvernement d’alors : il n’en fait rien, Et chaque Haïtien que l’on rencontre encore aujourd’hui dans les rues ou sur les boulevards de Paris, vous adresse imperturbablement cette question : "Que sont devenus les millions de l’emprunt versés par le Crédit général, français à la légation haïtienne ?".

Dans tous les cas, on ne voit pas trop pourquoi ce gouvernement provisoire aurait pris plus de souci de la réputation de son agent à Paris ; lorsqu’il n’a pas hésité lui-même à sacrifier le crédit du pays.

Mais ce qu’il y a de bizarre, c’est qu’après avoir tué dans les rues de Port-au-Prince, l’un des ministres responsables, et laissé les autres partir tranquillement pour Kingston (Jamaïque), l’on soit venu demander — à dix-huit cents lieues et à Paris — compte de l’emploi que