Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/229

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l’accusa, dans le Vengeur, de vider son dossier à la préfecture de police. Ce léporide appela Vermorel bombyx. Sous le raffiné littéraire, il y avait le poissard. En 48, à la Constituante, il appelait Proudhon : cochon ; à la Commune il appela Tridon : fumier. Le seul membre de cette assemblée où il y avait des ouvriers de professions rudes, qui ait jeté l’ordure dans la discussion.

Vermorel répondit dans le Cri du peuple et n’eut pas de peine à le coucher par terre. Ses électeurs lui envoyèrent trois sommations de rester à son poste : « Vous êtes soldat et vous devez rester sur la brèche. C’est nous seuls qui avons le droit de vous révoquer. » Traqué par ses mandants, menacé d’arrestation dans le Conseil, le grégeois rentra en minaudant à l’Hôtel-de-Ville.

Versailles triomphait de ces misères dévoilées. Pour la première fois, le public connut l’intérieur de la Commune, ses coteries minuscules faites d’amitiés et d’antipathies purement personnelles. Qui était de tel groupe était soutenu quand même, malgré les fautes. Pour être admis à servir la Commune il fallait appartenir à telle ou telle confrérie. Beaucoup de dévouements sincères s’offrirent, des démocrates éprouvés, des employés et jusqu’à des officiers républicains déserteurs de Versailles. Ils furent reçus de haut en bas par certains incapables nés de la veille, dont le dévouement ne devait pas survivre à l’entrée des troupes. Et cependant, l’insuffisance du personnel et des lumières devenait chaque jour plus évidente. « Depuis un mois, dit Vermorel à la séance du 20, nous sommeillons, nous n’avons pas d’organisation. » « On n’a pris Cluseret, disait Delescluze, que parce qu’on n’a pas trouvé d’autre soldat. » La Commission exécutive ne savait pas commander ; le Comité Central ne voulait pas se subordonner. Le Gouvernement, l’Administration, la défense allaient à l’aventure comme la sortie du 3 avril.