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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

chant et fait le coup de feu en avant du parc Monceaux et de la place Wagram ; les gardes nationaux, trompés par ses pantalons rouges, ouvrent sur lui un feu meurtrier. Il se replie et découvre le parc. Les Versaillais l’occupent et poussent vers les Batignolles. Là, les barricades les arrêtent : à gauche, depuis la place Clichy jusqu’à la rue Lévis ; au centre, rue Lebouteux, La Condamine, des Dames. À droite, on fortifie la Fourche, position rivale de celle de la place Clichy. Bientôt les Batignolles forment une avancée à Montmartre.

La principale forteresse se tait. Depuis dix-sept heures, elle assiste silencieuse à l’entrée des troupes de Versailles. Le matin, les colonnes de Douai et de Ladmirault, leur artillerie et leurs fourgons se sont rencontrés, emmêlés sur la place du Trocadéro ; quelques obus de Montmartre eussent changé cette confusion en déroute, et le moindre échec à l’entrée des troupes c’était pour Versailles un second 18 Mars ; les canons des buttes sont restés muets.

Quatre-vingt-cinq canons, une vingtaine de mitrailleuses gisent là, sales, pêle-mêle. Personne, pendant ces huit semaines, n’a songé à les mettre en ligne. Les projectiles de 7 abondent, il n’y a pas de gargousses. Au Moulin de la Galette, trois pièces de 24 sont les seules munies d’affûts ; il n’y a ni parapets, ni blindages, ni plate-formes. À neuf heures du matin, elles n’ont pas encore tiré. Au premier coup, le recul enterra les affûts et il fallut beaucoup de temps pour les dégager. Ces trois pièces elles-mêmes n’ont que très peu de munitions. De fortifications, de travaux de terre nulle part. À peine si l’on commence quelques barricades au pied des boulevards extérieurs. À neuf heures, La Cécilia, envoyé à Montmartre, trouve la défense dans cet état honteux. Il adresse des dépêches à l’Hôtel-de-Ville, conjurant les membres de la Commune d’accourir ou tout au moins d’envoyer des renforts en hommes et en munitions.

De même rive gauche à l’École militaire. En face du parc d’artillerie, les Versaillais, depuis une heure du matin, manœuvrent au Trocadéro. Pas un seul des canons de la Commune ne les a inquiétés.

Au lever du jour, la brigade Laugourian s’avance