Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/151

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Que sont les bouquets à ceux dont le Iront appella d’immortels lauriers ? Les éphémères sympathies, les louanges de passage, ne se mentionnent qu’à peine en présence d’une tombe que réclament de plus entières gloires. Les créations de Chopin sont destinées à porter dans des nations et des années lointaines, ces joies, ces consolations, ces bienfaisantes émotions, que les œuvres de l’art réveillent dans les âmes souffrantes, altérées et défaillantes, persévérantes et croyantes, auxquelles elles sont dédiées, établissant ainsi un lien continu entre les natures élevées, sur quelque coin de terre, dans quelque période des temps qu’elles aient vécu, mal devinées de leurs contemporains quand elles ont gardé le silence, souvent mal comprises quand elles ont parlé !

« Il est diverses couronnes, disait Goethe ; il en est même qu’on peut commodément cueillir durant une promenade. » Celles-ci charment quelques instans par leur fraîcheur embaumée, mais nous ne saurions les placer à côté de celles que Chopin s’est laborieusement acquises par un travail constant et exemplaire, par un amour sérieux de l’art, par un douloureux ressentiment des émotions qu’il a si bien exprimées. Puisqu’il n’a point cherché avec une mesquine avidité ces couronnes faciles, dont plus d’un de nous a la modestie de s’enorgueillir ; puisqu’il vécut homme pur, généreux, bon et compatissant, rempli d’un seul sentiment, le plus noble des sentimens terrestres, celui de la patrie ; puisqu’il a