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palais. Tandis qu’elle descend du balcon, Ortrude, dans un rauque cri de victoire, dans un accès de délire digne des hordes qui s’enivraient de sang, comme une prêtresse habituée à plonger le couteau dans le sein des victimes humaines, appelle à son aide ses Dieux à elle, ses Dieux reniés de leurs anciens adorateurs. Elle invoque Wodan et son tonnerre ! Freia l’enchanteresse ! elle les adjure de protéger sa trahison qui doit perdre les chrétiens ! Et tant de passion, tant de colère, tant de fiel, s’exhale de son âme, que tout le Pandaemonium pourrait se plonger avec délice, dans ce torrent de rage !

Hypocritement abaissée devant Elsa, aussitôt que celle-ci paraît, elle reçoit ses dons et sa pieuse hospitalité avec une feinte reconnaissance, et elle ajoute, « qu’impuissante à payer tant de bienfaits, elle ne possède qu’un seul trésor.... qui puisse prouver sa gratitude.... — Je veillerai sur ton bonheur !… » lui dit-elle tout bas «.... Pour toi je pénètrerai les mystères de l’avenir.... ! » La musique révèle aussitôt le dessein de la haineuse magicienne, en faisant suivre la phrase qui a traversé la dernière scène, par le motif de la défense du chevalier. « Sois prudente », continue-t-elle ; « reçois un avertissement, un conseil.... méfie-toi de ton fiancé inconnu,.... car le cygne qui l’a