Page:Liszt - Pages romantiques, 1912, éd. Chantavoine.djvu/140

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très restreint, et son orchestre suffit à peine à l’exécution des grands maîtres. Ne serait-il donc pas urgent que le gouvernement comblât cette lacune, en consacrant un orchestre et des chœurs habiles à l’exécution des œuvres modernes choisies par un jury spécial. Le public appelé durant plusieurs mois à l’audition de cette musique d’élite, se formerait le goût, et les jeunes artistes de talent seraient assurés de ne pas demeurer dans l’obscurité et l’oubli où les repoussent les innombrables obstacles qui s’élèvent sans cesse entre eux et la publicité. Certes, en prêtant ainsi son appui à l’art musical, en accordant aux musiciens ce qu’il accorde aux peintres, le gouvernement ferait une chose éminemment nationale, et qui mérite peut-être autant son attention que maint grave débat des Chambres, que mainte grave querelle du ministère. — La Convention, aux jours de la Terreur, n’a pas dédaigné de fonder le Conservatoire.

Mais je m’aperçois que je fais comme les dévots timides à confesse, qui réservent pour la fin de la confession ce qui leur coûte le plus à dire. J’ai reculé jusqu’ici à vous parler d’un débat musical dont on s’est beaucoup trop occupé, puisqu’il vous importune jusque dans votre solitude, et que, vous aussi, vous me demandez l’explication de la chose du monde la plus simple à son origine, mais devenue, à force de commentaires, la plus incompréhensible pour le public ; à force d’interprétations, la plus pénible et la plus irritante pour moi ; je