Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/143

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messes ouir, et leur souffist bien d’une, tant ont petite amour et devocion en Dieu et en son service ; car ouir son service repute sa propre personne. Car qui l’aime et craint, il le vuelt souvent veoir et ouir sa sainte parole ; et aussy du contraire, qui n’y a bien le cuer s’en passe ligierement, comme plusieurs font aujourd’uy, qui ont plus le cuer au siècle et au delit de la char que à Dieu.




Chappitre XXXIIIIe
De celles qui vont voulentiers es pellerinages


Un autre exemple vous vueil dire d’une dame qui estoit juenne et avoit le cuer au siècle. Si estoit un escuier qui estoit amouroux d’elle, et elle ne le heoit pas aussy, et pour plus avoir d’aise et de lieu pour parler et pour bourder ensemble, elle faisoit accroire à son seigneur qu’elle s’estoit vouée pour aler en pelerinaige, et son seigneur, qui preudhomme estoit, le souffroit, pour ce que il ne luy vouloit pas desplaire.

Sy advint une fois que elle et yceluy escuyer alèrent en un pelerinaige d’une place de nostre Dame. Si furent moult aysiez enmy le chemin de parler ensemble, car ilz y entendoient bien plus que à dire leurs heures et y avoient bien plus grant plaisir et plus grant delit, dont il advint que, quant ilz furent venus là et ilz furent au bon de la messe, l’ennemy, qui tousjours est en aguet de enflamber et tempter