Page:Londres - Au bagne.djvu/142

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— Non, monsieur.

— Vous ne voulez pas élever de bœufs ? Vous savez que cela coûte cher à la France d’acheter des bœufs au Brésil et au Venezuela.

— Pauvre France !

— Alors que faites-vous ici ?

Madame « Tentiaire » se dressa :

— Je règne, monsieur. Je règne sur le paludisme et l’ankylostomiase. Je règne sur la dégradation de neuf mille sept cents hommes, transportés, libérés, relégués. Je règne sur les requins des îles et les bambous de Cayenne et de Saint-Laurent. Je protège les arbres balata et les mines d’or. Si je traçais des routes, des bandes s’abattraient dans le pays qui saigneraient ces arbres, qui violeraient ces mines. Je régnerai longtemps, monsieur. La crapule est nombreuse. J’ai encore reçu six cent soixante-douze sujets hier. Mon royaume est solide, et, comme l’a dit Louis XV, mon aïeul : « Cela durera bien autant que moi. »


LES LIBÉRÉS


Saint-Laurent est la fourmilière du bagne. C’est là que les coupables désespèrent en masse. Quelques comptoirs pour l’or et le balata, le quartier administratif, un village chinois, des nègres bosch, qui ravitaillent les placers et rapportent les lingots, et, animant cela, des forçats, des « garçons de fa-