Page:Londres - Au bagne.djvu/82

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reste une case. Cette case est le théâtre d’un drame, un drame à un personnage.

Dans le camion, le chef des travaux en avait avisé le gouverneur. Le surveillant du kilomètre 10, qui, chaque matin, reçoit les vivres et doit les répartir aux cent hommes du camp, est fou.

— Vous allez voir.

Nous descendîmes.

Un homme jeune, maigre, brun, l’œil narquois, un long couteau rouillé à la main, une scie à viande à côté de lui, derrière son établi, tout en se dandinant, nous regardait venir.

— Monsieur le gouverneur, dit le chef des travaux, je dois vous informer que tout le monde se plaint de ce surveillant, les chefs et les transportés. Personne ne touche plus son poids de bœuf. Au camp, il n’arrive guère que des os. Cet homme désosse et racle tout. Et voyez ce qu’il fait de la viande.

Au-dessus de lui des cordes étaient tendues comme pour sécher du linge, mais c’étaient des lambeaux de viande qui pendaient, verts et noirs.

— Allons ! Qu’est-ce que c’est que ça ? répéta le gouverneur.

— C’est mes rations !

— Non ! monsieur le gouverneur, ce ne sont pas ses rations, c’est ce qui devait être autour des os, qu’il envoie au camp.

Toute cette charogne, dont les morceaux da-