Page:Loti - Aziyadé.djvu/30

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s’était couvert la figure de ses bras, et restait là, terrifié de lui-même, immobile et tremblant…

Mais, depuis cet instant étrange, il est à mon service corps et âme ; il joue chaque soir sa liberté et sa vie en entrant dans la maison qu’Aziyadé habite ; il traverse, dans l’obscurité, pour aller la chercher, ce cimetière rempli pour lui de visions et de terreurs mortelles ; il rame jusqu’au matin dans sa barque pour veiller sur la nôtre, ou bien m’attend toute la nuit, couché pêle-mêle avec cinquante vagabonds, sur la cinquième dalle de pierre du quai de Salonique. Sa personnalité est comme absorbée dans la mienne, et je le trouve partout dans mon ombre, quels que soient le lieu et le costume, que j’aie choisis, prêt à défendre ma vie au risque de la sienne.