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Page:Loti - Les Derniers Jours de Pékin, 1901.djvu/341

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LES DERNIERS JOURS DE PÉKIN.

se chauffe à ces rayons d’avril, mais sans s’éveiller, sans reprendre vie après son long hiver glacé. Pas une goutte de pluie encore n’est tombée : un sol de poussière, des parcs de poussière.

Les vieux cèdres, noirâtres et poudreux, semblent des momies d’arbres, tandis que le vert des saules monotones commence à peine de poindre timidement, dans l’air comme blanchi de cendre, sous le terrible soleil tout blanc. En haut, vers un ciel clair qui est tissé de lumière et de chaleur, montent les souveraines toitures, les pyramides de faïence couleur d’or, dont l’affaissement de plus en plus s’accuse, et la vétusté, sous les touffes d’herbe et les nids d’oiseau. Les cigognes de Chine, revenues avec le printemps, sont toutes là perchées, en rang sur le faîte prodigieux des palais, sur les précieuses tuiles, parmi les cornes et les griffes des monstres d’émail : petites personnes immobiles et blanches, à demi perdues dans l’éblouissement de ce ciel, on dirait qu’elles méditent longuement sur les destructions de la ville, en