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MADAME CHRYSANTHÈME

dales ; et j’entrai sur la pointe du pied, tout doucement, pour aller m’asseoir sous la véranda.

Quel dommage que cette petite Chrysanthème ne puisse pas toujours dormir : elle est très décorative, présentée de cette manière, — et puis, au moins, elle ne m’ennuie pas. — Peut-être, qui sait ? si j’avais le moyen de mieux comprendre ce qui se passe dans sa tête et dans son cœur… Mais, c’est curieux, depuis que j’habite avec elle, au lieu de pousser plus loin l’étude de cette langue japonaise, je l’ai négligée, tant j’ai senti l’impossibilité de m’y intéresser jamais…

Assis sous ma véranda, je regardai à mes pieds les temples et les cimetières, et les bois, et les vertes montagnes, tout Nagasaki baigné de soleil. Les cigales faisaient leur bruit le plus strident, qui tremblait comme une fièvre de l’air. Tout cela était calme, lumineux et chaud…

Eh bien, pourtant, pas assez, à mon gré ! Qu’y a t-il donc de changé sur terre ? Les midis brûlants d’été, ceux que je retrouve dans mes souvenirs lointains, avaient encore plus d’éclat, encore plus de soleil ; le Baal autrefois me semblait plus puissant, et plus terrible. On dirait que tout ceci n’est