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MADAME CHRYSANTÈME

bizarrerie des dessins, le choix raffiné des couleurs.

Je m’étends sur mes nattes si blanches ; Chrysanthème, empressée, m’apporte l’oreiller en peau de serpent, et les mousmés souriantes, ayant encore en tête leur rythme interrompu de tout à l’heure, circulent autour de moi, à pas cadencés.

Leurs irréprochables chaussettes, à orteil séparé, ne font pas de bruit ; on n’entend, quand elles passent, qu’un froufrou d’étoffes. Je les trouve toutes agréables à regarder ; cet air poupée qu’elles ont me plaît à présent, et je crois découvrir ce qui le leur donne : non pas seulement ces figures rondes, inexpressives, à sourcils très éloignés des yeux ; mais surtout cet excès d’ampleur dans leurs robes. Avec ces manches si grandes, on dirait qu’elles n’ont pas de dos, pas d’épaules ; leurs personnes délicates sont perdues dans ces vêtements larges, qui flottent comme autour de petites marionnettes sans corps, et qui glisseraient d’eux-mêmes jusqu’à terre, à ce qu’il semble, s’ils n’étaient retenus, à mi-hauteur de bonne femme, par ces larges ceintures de soie. — Une manière de comprendre le costume bien différente de la nôtre,