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MADAME CHRYSANTHÈME

semble-t-il diminué, plus mièvre encore, et plus triste aussi, — sans doute à cause de ce suaire de nuages noirs, à cause de cette pluie…


En attendant M. Kangourou (qui va arriver, paraît-il, qui s’habille), faisons la dînette.

Dans un bol des plus mignons, orné de cigognes envolées, il y a un potage invraisemblable, aux algues. Ailleurs, des petits poissons secs au sucre, des crabes au sucre, des haricots au sucre, des fruits au vinaigre et au poivre. Tout cela atroce, mais surtout imprévu, inimaginable. Elles me font manger, les petites femmes, riant beaucoup, de ce rire perpétuel, agaçant, qui est le rire japonais, — manger à leur manière, avec de gentilles baguettes et un doigté plein de grâce. Je m’habitue à leurs figures. L’ensemble de tout cela est raffiné, — d’un raffinement très à côté du nôtre par exemple, que je ne puis guère bien comprendre à première vue, mais qui à la longue finira peut-être par me plaire.

… Entre tout à coup, comme un papillon de nuit réveillé par le plein jour, comme une phalène rare et surprenante, la danseuse d’à côté, l’enfant qui portait le masque sinistre. C’est pour me voir