Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/96

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

éprouver ce tressaillement du ventre qu’on a dans les chutes simulées des « chars russes » ou dans celles imaginaires des rêves. Elle glissait comme à reculons, la montagne fuyante se dérobant sous elle pour continuer de courir, et alors elle était replongée dans un de ces grands creux qui couraient aussi ; sans se meurtrir, elle en touchait le fond horrible, dans un éclaboussement d’eau qui ne la mouillait même pas, mais qui fuyait comme tout le reste ; qui fuyait et s’évanouissait en avant comme de la fumée, comme rien…

Au fond de ces creux, il faisait plus noir, et après chaque lame passée, on regardait derrière soi arriver l’autre ; l’autre encore plus grande, qui se dressait toute verte par transparence ; qui se dépêchait d’approcher, avec des contournements furieux, des volutes prêtes à se refermer, un air de dire : « Attends que je t’attrape, et je t’engouffre… »

… Mais non : elle vous soulevait seulement, comme d’un haussement d’épaule on enlèverait une plume ; et, presque doucement, on la sentait passer sous soi, avec son écume bruissante, son fracas de cascade.

Et ainsi de suite, continuellement. Mais cela