Page:Lourié - La Philosophie de Tolstoï.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

convaincu que la rénovation de la vie est possible. Et cette foi est tellement puissante qu’elle se communique aux autres…

Au milieu de la monotonie des tristes plaines russes, dans ce mélange de la barbarie orientale et des raffinements empruntés à l’Occident malade, parmi les éléments différents et homogènes de la société cosaque où le knout est encore le maître et le clergé l’éducateur, où une minorité, puissante par la faiblesse de la majorité, escamote à son profit les richesses du pays et le travail du peuple ; au milieu de l’anarchie morale et intellectuelle où les théories de Rousseau rivalisent avec celles de Darwin, où chacun ayant le sentiment instinctif qu’il y a de grandes réformes à faire, mais personne ne sachant au juste dans quel sens il convient de les opérer, où une volonté virginale est souvent mise au service de la folie, où un dévouement sans bornes, un héroïsme sauvage sont couverts d’un brouillard intense aveuglant ceux qui croient voir trop loin ; au milieu des tristes plaines et des steppes désertes, le regard serein de l’apôtre de Iasnaïa-Poliana semble indiquer et illuminer la voie à suivre…

Sa voix, c’est la voix de la conscience qui éclate au milieu des lâches silences et des passions mensongères :

— J’ai retrouvé le chemin qui conduit à la lumière : Venez tous !