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LE FINANCIER RABEVEL

mouvement qui devait déterminer la catastrophe devait avoir pour caractères essentiels d’être invisible, (c’est-à-dire d’apparence toute normale), définitive et enfin de ne pouvoir se développer que d’une seule manière fatale et nécessaire, sans bifurcation possible. Comment provoquer le déclenchement ? Comment lier ses adversaires simultanément sur les asphaltières et sur l’affaire Bordes pour les étrangler ensuite par là. Du côté des asphaltières évidemment ils auraient besoin d’argent pour lever l’option ; si on leur en offrait du côté Bordes ? Oui, sans doute, mais sous quel prétexte ? Voilà à quoi il revenait toujours. C’était là le nœud de la question. Il se coucha de bonne heure et continua de méditer dans la pénombre que faisait la lampe voilée de gaze. Et, enfin, la bonne idée se présenta. Il se rappela à propos l’ambition qu’avait toujours manifestée le Conseil d’Administration de Bordes et Cie : troquer ses voiliers contre des vapeurs. Il fallait leur acheter des voiliers, c’était la solution, leur verser de l’argent tout de suite et engager Blinkine et Mulot dans quelque sale aventure d’emploi de fonds injustifié. Mais par qui faire acheter ces voiliers ? Comment tendre la souricière aux deux acolytes ? Cela, c’était facile ; Bernard ne s’en inquiétait pas beaucoup, il avait confiance en son génie d’invention. L’essentiel était de trouver une base de départ solide, normale, rationnelle : il l’avait, le reste irait tout seul ; c’était un jeu. Il resta une partie de la nuit à échafauder des plans, à examiner toutes les éventualités et la possibilité de les réduire ou de les