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Page:Luigi - Le Don Quichotte montréalais sur sa rossinante, 1873.djvu/13

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ce quand je le vois interpréter la parole de Dieu. Quoique vous disiez, j’aime mieux les explications et interprétations de l’Église que les vôtres. Vous venez un peu tard, voyez-vous, et avec une raison qui semble bien peu affermie et même fortement engagée dans la voie du radotage.

Cette raison humaine, considérée humainement, que peut-elle la plupart du temps ? Vous le savez par expérience ; je viens de vous le mettre sous les yeux : se contredire et entasser inepties sur inepties sitôt qu’elle veut construire de ses propres mains un édifice religieux. Où en serions-nous, par exemple, s’il nous fallait accepter un code religieux de votre fabrique ? À admettre ni plus ni moins que des ineffabilités semblables à celles que Mahomet, votre modèle, nous dit lui avoir été révélées par son grand coq blanc.

La raison humaine seule ne peut nous servir de guide et rien de surprenant dans cette proposition. Vous vous rappelez ce que je vous ai dit relativement à l’ordre surnaturel. Si vous m’avez compris, vous avez dû voir que l’homme, étant appelé à une fin absolument surnaturelle, doit de toute nécessité croire des vérités absolument surnaturelles c’est-à-dire des vérités que nulle intelligence créée, si parfaite qu’on la suppose, ne comprendra jamais. La chose est évidente, car autrement l’ordre surnaturel ne serait pas lui-même, ce qui est absurde.

Et d’ailleurs n’admettez-vous pas vous-même la vérité sur laquelle j’insiste ici, lorsque vous dites, page 48 de vos abominations, que l’homme ne saurait jamais égaler Dieu ? Or, si l’homme ne saurait jamais égaler Dieu, il s’en suit rigoureusement que l’homme ne comprendra jamais Dieu parfaitement, et que Dieu, par conséquent, peut nous révéler, comme c’est en effet ce qui a eu lieu, une foule de vérités touchant sa nature, ses opérations, etc., que nous ne pourrons jamais comprendre. Donc la foi, dans notre état présent, est absolument nécessaire et quiconque le nie renonce par là même au titre d’être raisonnable. Pourriez-vous refuser d’admettre cette conclusion, vous, l’homme raisonnable et philosophique par excellence, si l’on en croit vos affirmations ?

Donc, encore en matière de foi, il n’y a pas à discuter,