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Page:Luigi - Le Don Quichotte montréalais sur sa rossinante, 1873.djvu/15

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il s’en suit que les plus stupides seront les plus libres, n’étant pas obligés de croire les vérités dont ils ne voient point la rectitude et qui les gêneraient dans la pratique. Cette théologie, qui est la vôtre, est bonne pour les veaux ; mais les hommes, qui portent le visage tourné vers le ciel, ne sauraient s’en contenter.

Vous invoquez ce passage des Saintes Écritures où il est dit que la loi du Christ est la loi de la parfaite liberté. Mais vous interprétez ces paroles en vrai luron que vous êtes. Allez-vous, en bonne vérité, vous mettre en tête de nous faire accroire que Notre-Seigneur Jésus-Christ est venu sur la terre ôter tout frein à la pensée comme aux passions humaines ? Pourquoi descendre du ciel dans la but de nous apprendre que nous n’avions qu’à vivre en pourceaux, comme les grands philosophes de l’antiquité, pour être agréables à ses yeux ? C’était parfaitement inutile ; il n’avait qu’à laisser aller le monde comme il allait.

La liberté, que nous donne la loi du Christ, est une liberté qui nous affranchit du mal, tant dans nos pensées ou opinions que dans nos actes. Le pouvoir de penser comme de faire le mal ne constitue pas la vraie liberté ; c’est, au contraire, une faiblesse, par conséquent un manque de liberté. Tous ceux qui, en ce bas monde, ont le moins de liberté, et vous comptez parmi ces gens-là, illustre M. Dessaulles, sont ceux qui boivent l’erreur et l’iniquité comme l’eau. Dieu est le plus libre des êtres, parcequ’il n’est sujet ni à l’erreur ni au mal. Plus on lui ressemble, c’est-à-dire moins on tombe dans l’erreur et moins on commet de fautes, plus on est libre.

La conclusion à tirer de là, c’est que l’Église romaine, par ses Congrégations, surtout par la Congrégation de l’Index, favorise extrêmement la liberté, loin de la restreindre, quoiqu’en dise votre pauvre petite raison qui choppe à la moindre difficulté. En comprimant la licence des opinions, la liberté de penser, de même qu’en défendant sous les peines les plus sévères les œuvres où pullulent les erreurs de toute sorte, elle ne fait rien autre chose que nous maintenir dans la vraie liberté des enfants de Dieu.

Il y a une vérité et c’est le plus excellent de tous les biens ; vous êtes forcé d’en convenir. Si donc il est légitime, comme on