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Page:Luigi - Le Don Quichotte montréalais sur sa rossinante, 1873.djvu/88

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clésiastique ancienne, tel que commenté par Saint Grégoire-le-Grand, que vous déclarez être digne de toute votre admiration.

L’Apôtre Saint Pierre, sans blesser aucunement la foi, mais par pure condescendance, avait usé vis-à-vis de certains juifs, à propos de la distinction des viandes prescrites par la loi mosaïque, d’une dissimulation qui était dangereuse. Saint Paul comprit aussitôt quelles funestes suites pouvaient avoir un acte de faiblesse, provenant d’une bonne intention, mais qui pouvait entraver la conversion des Gentils. Il pensa donc qu’il ne fallait rien ménager, que ce n’était pas le moment d’user de réserve, et il reprit publiquement Saint Pierre, le chef du collège des Apôtres, le représentant de Jésus-Christ sur la terre, choisi par Jésus-Christ même. Saint Pierre accueillit la réprimande avec docilité et une profonde humilité ; bien plus, il n’hésita pas à qualifier d’admirables les épitres de Saint Paul où se trouve le récit de sa faute. Là-dessus, le pape Saint Grégoire-le-Grand fait les réflexions suivantes, dans une homélie :

« Paul, dans ses épitres, dit que Pierre a été répréhensible, et Pierre, dans les siennes, dit que Paul est admirable dans ses écrits. Puisqu’il les trouve dignes d’éloges, c’est qu’il les a lues ; s’il les a lues, il y a vu ce qui le regarde. Son amour pour la vérité l’a emporté sur toute autre considération ; il a approuvé le récit même de sa faute ; il a écouté l’avis de son inférieur et l’a suivi. Le premier par son suprême apostolat, il devait être aussi le premier par son humilité. Voyez, il est repris par son inférieur, et il ne s’indigne pas d’être repris. Il ne fait pas observer qu’il a été le premier appelé à l’apostolat, qu’il a reçu les clefs du royaume des cieux, que tout ce qu’il a délié sur la terre est délié dans le ciel. Il ne rappelle pas qu’il a marché sur les eaux, qu’il a redressé d’un mot un paralytique au nom de Jésus, que l’ombre de son corps a guéri des malades, que sa parole a fait expirer Ananie et Saphire, que sa prière a ressuscité les morts. Aux reproches qu’on lui faisait, il n’a rien voulu opposer, afin de ne rien perdre du mérite de cet acte d’humilité. Qui de nous, s’il avait fait le plus petit miracle, recevrait avec cette patience les réprimandes de son inférieur ? »