Page:Luzel - Contes populaires, volume 1, 1887.djvu/93

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Plus loin, ils virent, au bord d’une rivière, deux arbres qui s’entre-choquaient et se battaient avec tant d’acharnement qu’il en jaillissait au loin des fragments d’écorce et des éclats de bois. Yvon avait un bâton à la main, et, quand il fut près des deux arbres, il interposa son bâton entre les deux, combattants, en leur disant :

— Qu’avez-vous donc A vous maltraiter de la sorte ? Cessez de vous faire du mal, et vivez en paix.

A peine eut-il prononcé ces paroles, qu’il fut étonné de voir les deux arbres se changer en deux, hommes, mari et femme, qui lui parlèrent

— Notre bénédiction sur vous ! Voici trois cents ans passés que nous nous battions ainsi, avec acharnement, et personne n’avait pitié de nous, ni ne daignait nous adresser la parole. Nous sommes deux époux qui nous disputions et nous battions constamment, quand nous étions sur la terre, et, pour notre punition, Dieu nous avait condamnés à continuer de nous battre encore ici, jusqu’à ce que quelque âme charitable eut pitié de nous, et nous adressât une bonne parole. Vous avez mis fin à notre supplice, en agissant et en parlant comme vous l’avez fait, et nous allons, à présent, au paradis, où nous espérons vous revoir, un jour.