Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/213

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la résine bouillante, jusqu’à ce que ma chair se détache par lambeaux. Tu lèveras alors les yeux au ciel, pour voir quel temps il fera.

Maudès, effrayé, répondit :

— Je ne pourrai jamais faire ce que vous me dites là, mon père !

— Hélas ! mon enfant, je ne puis pourtant être sauvé sans cette dernière épreuve.

— Alors, j’essaierai, mon père.

Et ils confectionnèrent ensemble la croix. Puis le vieillard s’étendit dessus, et Maudès l’y fixa en lui enfonçant des clous dans les mains et les pieds. Ensuite, il fit bouillir de la poix et de la résine dans une chaudière, et en enduisit le corps du crucifié, dont des lambeaux de chair se détachaient et tombaient à terre. Plus d’une fois, il fut sur le point de défaillir dans cette horrible besogne, et de s’enfuir ; mais, songeant que le salut du vieux brigand était à ce prix, il eut le courage d’aller jusqu’au bout. Il leva les yeux au ciel, pour voir le temps qu’il faisait, selon la recommandation du vieillard, et vit venir à tire d’aile, du côté du nord, un corbeau noir, qui s’abattit en croassant sur une des branches de la croix ; puis aussitôt une colombe blanche, venue du côté du levant, vint se poser sur l’autre branche de la croix, et un combat acharné s’engagea entre les deux oiseaux. Au fort du combat,