Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 1, 1881.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa bouche de la rivière qui coulait à une lieue de là. Et il priait et jeûnait, et se macérait le corps, sans pitié.

Il y avait déjà longtemps qu’ils vivaient tous les deux de cette façon. Le vieil ermite s’attendait à voir fleurir son bâton bien avant celui du brigand, et comme il ne fleurissait pas assez vite, à son gré, il s’impatientait et murmurait parfois. Le brigand, au contraire, ne regardait pas son bâton, ne s’attendant pas à le voir fleurir de si tôt, et il priait constamment, les yeux et les mains levés vers le ciel.

Mais voilà que son bâton vint à fleurir, un jour, sans qu’il s’en aperçût, et il continuait toujours de l’arroser. Si bien que l’ermite lui dit :

— Regardez votre bâton : il a fleuri !

Mais il ne croyait pas, et il priait toujours, les yeux levés vers le ciel. Son bon ange descendit alors auprès de lui et lui dit :

— Venez, homme de foi, venez avec moi recevoir votre récompense dans le ciel !

Et ils montèrent tous les deux au ciel.

Le bâton du vieil ermite finit aussi par fleurir, mais plus tard, parce que son repentir et sa douleur n’étaient pas aussi sincères et aussi vifs que ceux du brigand.

C’est ainsi que l’on ne doit jamais désespérer de la clémence de Dieu, quelque grands et nom-