Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 1.djvu/73

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parties qu’il fut obligé de confier à ses collaborateurs sont très-loin du degré de perfection des parties qui sont entièrement de lui. Malheureusement aussi ce géographe, très-instruit d’ailleurs, n’avait aucune connaissance géologique. En 1794, à la prise de l’île, cette carte tomba entre les mains du général anglais, Charles Grey, qui l’envoya en Angleterre, pour qu’on en multipliât les copies ; elle périt dans l’incendie du vaisseau qui la transportait, et les soins qu’on avait pris pour sa conservation eurent un effet tout contraire. Le ministère anglais desirait une carte physique qui pût, dans tous les temps, servir à tracer les opérations militaires d’une invasion. Il en chargea un officier français nommé de Sanée, qui la commença en effet, mais il devint trop exigeant, et l’on eut recours à d’autres moyens.

Par suite du traité d’Amiens, la Martinique fut rendue à la France, des officiers de génie y furent envoyés, mais ils périrent presque tous de la fièvre jaune presque en arrivant. MM. Allaire et Moreau de Jonnès, aides-de-camp du commandant en second de la colonie, furent chargés de lever une carte nouvelle. À peine les opérations étaient-elles commencées, que M. Allaire fut atteint lui-même de la fièvre jaune, et périt au bout de cinq jours. M. Moreau de Jonnès ne résista qu’avec peine aux effets de l’action du soleil des tropiques et aux exhalaisons délétères qui s’élèvent des marais fangeux et des forêts humides qu’il avait à traverser journellement. Le général qui vérifiait les opérations sur le terrain périt enfin lui-même, et M. Moreau de Jonnès resta seul. Pendant huit annéeş il s’occupa de ce travail : ensuite ; devenu prisonnier de guerre, et retenu pendant six ans, il eut beaucoup de peine à sauver ses manuscrits.

Dès le commencement de ses opérations il put reconnaître que tout ce qu’on avait écrit sur cette île n’était fondé ni sur l’observation, ni sur la vérité. Il cite la description de Raynal pour la réfuter. Il affirme, contre le récit de cet auteur, que la