Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/251

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la phthisie pulmonaire, des scrofules, et de plusieurs autres maladies souvent héréditaires, que l’on connaît assez bien pour les traiter avec succès, quoiqu’on n’en connaisse souvent pas la véritable cause ? Si les médecins grecs se sont exprimés de cette manière à l’égard de la goutte, n’est-ce pas parce qu’ils parlaient de la première cause, plutôt métaphysique que physique ? N’est-ce pas aussi ce qui a fait dire aux nosologistes les plus célèbres qui leur ont succédé, en parlant de cette première cause des maladies, qu’on ne la connaissait pas ?

Sauvages, mon ancien professeur de médecine, dit en divers endroits de sa Nosologie : Causa tanquam causa, nunquam cadit in sensus ; et les physiciens ont presque tous pensé de même.

En effet, il n’est que trop vrai qu’il y a plusieurs maladies que les médecins traitent et guérissent, dont on ne connaît pas mieux la véritable cause. C’est ce qui a fait dire à Cicéron : Eventa rerum magis arbitror, quam causas, quœri opportere ; et ego sum contentus quod etiam si quomodo quidquid fiat ignorem, quod fiat intelligo.

Cependant les médecins, imbus de ces idées, tombèrent dans d’autres erreurs non moins préjudiciables à l’égard de la goutte, tantôt en croyant que cette maladie affectait essentiellement et uniquement le cerveau, la moelle épinière et les nerfs, tantôt d’autres organes pectoraux et abdominaux ; tandis que d’autres médecins, la plupart leurs successeurs, ont regardé la goutte comme provenant seulement d’une altération particulière des nerfs, du sang et de la lymphe ; et quelques-uns plus spécialement, de la bile, ou des urines, contenant une matière terreuse qui concourait à produire la goutte