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XXXVII

Claude Bernard, qui, après son rétablissement complet, s’étend, comme on sait, depuis son transfert au Muséum, en 1868, jusqu’à sa mort au début de 1878. Dans ce court espace de neuf années, son point de vue s’est élevé, son horizon s’est élargi il s’est proposé de faire entrer l’ensemble des plantes dans le cadre de ses recherches, jusque-là consacrées uniquement aux animaux. C’est ce qu’on peut appeler sa seconde manière. Par là, il s’est efforcé de fonder la Physiologie générale, c’est-à-dire, si l’on donne à ce mot son véritable sens, la branche physiologique du tronc commun qui est la Biologie générale.

Dès lors, il a dû nécessairement s’intéresser de plus près aux choses de la Biologie végétale, de la Botanique, auxquelles il était jusque-là demeuré assez étranger. En s’initiant ainsi aux phénomènes nutritifs désolantes, tels qu’ils étaient déjà connus à cette époque, il fut grandement surpris d’apprendre combien de résultats, progressivement acquis dans ce vaste domaine, offraient de ressemblance avec ceux qu’il avait lui-même obtenus en Physiologie animale.

Que l’on me permette d’évoquer ici un souvenir personnel ; il ne m’éloigne pas de mon sujet. C’était en 1874 ; je venais de traduire, sur la 4e édition et en l’annotant, le Traité due Botanique de l’éminent physiologiste allemand Julius Sachs. Claude Bernard avait lu et longuement médité ce livre. Un jour, sortant de son laboratoire du Collège de France, il me rencontra et, venant à moi la main tendue « Je voulais aller vous voir, me dit-il, pour vous remercier du service que vous m’avez rendu. J’ai lu et relu votre Saçhs. Que de choses ce livre m’a apprises que j’ignorais et qui m’intéressent au plus haut degré. C’est tout une Botanique nouvelle que vous m’avez révélée. Si j’avais su tout cela quelques années plus tôt, mes recherches en auraient été abrégées et je leur aurais imprimé une tout autre direction. Mais il est peut-être encore temps et je vais m’y mettre. » D’avoir pu, par ce travail ingrat, faciliter en quelque mesure les recherches de Claude Bernard, j’étais déjà payé de ma peine. Il ne s’en tint pas là. Depuis ce