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XLI

ardemment recherchée par lui, on sait aujourd’hui qu’elle existe. Vingt ans après sa mort, en 1897, elle a été découverte dans la Levure de bière par un chimiste allemand, M. Édouard Buchner, qui l’a nommée zymase, et c’est là certainement, Duclaux, Roux et avec eux toute l’École de Pasteur se sont empressés de le proclamer, « une acquisition capitale de la Science ». Si donc Renan a pu dire autrefois « Il est mort sans avoir pu réaliser son rêve », et si ce regret a été vingt ans partagé par tout le monde savant, ses disciples peuvent aujourd’hui constater, non sans quelque fierté, que, fondé sur une idée juste, ce rêve était parfaitement réalisable, puisqu’il est devenu, après lui et peut-être un peu par lui, une vivante réalité.

Interrompus trop tôt pour la Science et pour le Pays, mais féconds jusqu’au bout, comme on voit, et même par delà la tombe, les efforts de Claude Bernard ont donc créé une œuvre immense, si grande, à la fois comme inventeur et comme législateur de la Physiologie, que l’on comprend et que l’on trouve justifiée la réponse, en apparence excessive, de Dumas à Duruy, qui lui demandait « Que pensezvous de ce grand physiologistea » — « Ce n’est pas un grand physiologiste, c’est la Physiologie elle-même », et que l’on souscrit au mot de Brunetière, disant vingt ans plus tard « Il fut plus encore que la Physiologie elle-même, il fut vraiment un maître des intelligences. »

De cette œuvre ainsi faite, voici ce que Paul Bert disait en 1886 « Depuis huit ans le maître n’est plus. La critique de ses rivaux, celle de ses élèves même, a pu s’exercer en pleine liberté. Or, aucun de ses travaux n’a été entamé ; son œuvre reste entière, intacte et debout ; à peine a-t-on pu, sur quelques points, la pousser un peu plus avant. Il semble qu’elles soient toutes jeunes et nouvelles, ses découvertes ; il semble que leur auteur ne soit mort que d’hier. » C’est aussi ce qu’en d’autres termes M. Dastre répétait en 1894 « Depuis la mort de Claude Bernard, seize années se sont écoulées, le temps qu’une génération succède à une autre mais surtout deux révolutions se sont