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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/217

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PICHEGRU, MOREAU ET CADOUDAL.

jalousie de sa femme et de sa belle-mère contre Joséphine.

D’après cette disposition d’esprit de Moreau, il ne devait pas être difficile de l’amener à s’entendre avec Pichegru pour le renversement du gouvernement.

Un Breton nommé Lajolais, agent de Louis XVIII et ami de Moreau, devint l’intermédiaire entre celui-ci et Pichegru ; il allait continuellement de Londres à Paris ; mais comme il s’aperçut bientôt que, tout en consentant au renversement de Bonaparte, Moreau avait le projet de garder le pouvoir pour lui-même, et nullement de le remettre aux Bourbons, on espérait qu’une entrevue du général avec Pichegru le ramènerait à de meilleurs sentiments. Celui-ci, débarqué par un vaisseau anglais sur les côtes de France, près du Tréport, se rendit à Paris, où Georges Cadoudal l’avait précédé, ainsi que M. de Rivière, les deux Polignac et autres royalistes.

Georges Cadoudal était le plus jeune des nombreux fils d’un meunier du Morbihan ; mais comme un usage fort bizarre, établi dans une partie de la basse Bretagne, donnait tous les biens au dernier-né de chaque famille, Georges, dont le père était aisé, avait reçu une certaine éducation. C’était un homme court, aux épaules larges, au cœur de tigre, et que son courage audacieux avait appelé au commandement supérieur de toutes les bandes des chouans de la Bretagne.

Il vivait à Londres depuis la pacification de la Vendée ; mais son zèle fanatique pour la maison de Bourbon ne lui permettant de goûter aucun repos, tant que le premier Consul serait à la tête du gouvernement français, il forma le dessein de le tuer, non par assassinat caché, mais en plein jour, en l’attaquant sur la route de Saint-Cloud avec un détachement de trente à quarante chouans