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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/218

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

à cheval, bien armés et portant l’uniforme de la garde consulaire. Ce projet avait d’autant plus de chances de réussir, que l’escorte de Bonaparte n’était ordinairement alors que de quatre cavaliers.

Une entrevue fut ménagée entre Pichegru et Moreau. Elle eut lieu la nuit, auprès de l’église de la Madeleine, alors en construction. Moreau consentait au renversement et même à la mort du premier Consul, mais refusait de concourir au rétablissement des Bourbons. La police particulière de Bonaparte lui ayant signalé de sourdes menées dans Paris, il ordonna l’arrestation de quelques anciens chouans qui s’y trouvaient, et l’un d’eux fit des révélations importantes, qui compromirent gravement le général Moreau, dont l’arrestation fut résolue au conseil des ministres.

Je me souviens que cette arrestation fit le plus mauvais effet dans le public, parce que Georges et Pichegru n’étant pas encore arrêtés, personne ne les croyait en France ; aussi disait-on que Bonaparte avait inventé la conspiration pour prendre Moreau. Le gouvernement avait donc le plus grand intérêt à prouver que Pichegru et Georges étaient à Paris, et qu’ils avaient vu Moreau. Toutes les barrières furent fermées pendant plusieurs jours, et une loi terrible fut portée contre ceux qui recèleraient les conspirateurs. Dès ce moment, il leur devint fort difficile de trouver un asile, et bientôt Pichegru, M. de Rivière et les Polignac tombèrent entre les mains de la police. Cette arrestation commença à ramener l’esprit public sur la réalité de la conspiration, et la capture de Georges acheva de dissiper les doutes qui auraient pu subsister encore à ce sujet. Georges ayant déclaré dans ses interrogatoires qu’il était venu pour tuer le premier Consul, et que la conspiration devait être appuyée par un prince de la famille royale, la police