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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/240

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

deux housards ennemis parurent au sommet et déchargèrent leurs mousquetons sur moi. Heureusement, la neige dans laquelle je me débattais ainsi que mon cheval, ayant empêché les cavaliers autrichiens de bien ajuster, je ne reçus aucun mal ; mais ils allaient réitérer leur feu, lorsque l’approche d’un peloton de chasseurs, que le maréchal Augereau envoyait à mon secours, les contraignit à s’éloigner promptement. Avec un peu d’aide, je sortis du ravin ; mais on eut beaucoup de peine à en retirer mon cheval, qui cependant n’était pas blessé non plus, ce qui permit à mes camarades de rire de l’étrange figure que j’avais, à la suite de mon bain de neige.

Après avoir conquis tout le Vorarlberg, nous nous emparâmes de Bregenz, et acculâmes le corps autrichien de Jellachich au lac de Constance et au Tyrol. L’ennemi se couvrit de la forteresse de Feldkirch et du célèbre défilé de ce nom, derrière lesquels il pouvait nous résister avec avantage : nous nous attendions à livrer un combat très meurtrier pour enlever cette forte position, lorsque, à notre grand étonnement, les Autrichiens demandèrent à capituler, ce que le maréchal Augereau s’empressa d’accepter.

Pendant l’entrevue que les deux maréchaux eurent à cette occasion, les officiers autrichiens, humiliés des revers que leurs armes venaient d’essuyer, se donnèrent le malin plaisir de nous annoncer une très fâcheuse nouvelle, tenue cachée jusqu’à ce jour, mais que les Russes et les Autrichiens avaient apprise par la voie de l’Angleterre. La flotte franco-espagnole avait été battue par lord Nelson, le 20 octobre, non loin de Cadix, au cap Trafalgar. Notre malencontreux amiral Villeneuve, que les ordres précis de Napoléon n’avaient pu déterminer à sortir de l’inaction, lorsque l’apparition subite de toutes