Aller au contenu

Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
219
CONQUÊTE DU VORARLBERG.

campa autour de Donaueschingen, ville fort agréable, où se trouve le magnifique château de l’antique maison des princes de Furstenberg.

Le maréchal Augereau et ses aides de camp logèrent au château, dans la cour duquel se trouve la source du Danube ; ce grand fleuve montre sa puissance en naissant, car à sa sortie de terre il porte déjà bateau. Les attelages de l’artillerie et nos équipages avaient éprouvé de très grandes fatigues dans les défilés rocailleux et montueux de la forêt Noire, que le verglas rendait encore plus difficiles. Il fallut donc donner aux chevaux plusieurs jours de repos, pendant lesquels les cavaliers autrichiens venaient de temps à autre tâter nos avant-postes, placés à deux lieues en avant de la ville ; mais tout se bornait à un tiraillement qui nous amusait, nous exerçait à la petite guerre, et nous apprenait à connaître les divers uniformes ennemis.

Je vis là pour la première fois les uhlans du prince Charles, les dragons de Rosenberg et les housards de Blankenstein. Nos chevaux d’attelage ayant repris leur vigueur, l’armée continua sa marche, et pendant plusieurs semaines nous eûmes des combats continuels qui nous rendirent maîtres d’Engen et de Stockach.

Quoique souvent très exposé dans ces divers engagements, je n’éprouvai qu’un seul accident, mais il pouvait être fort grave. La terre était couverte de neige, surtout auprès de Stockach. L’ennemi défendait cette position avec acharnement. Le maréchal m’ordonne d’aller reconnaître un point sur lequel il voulait diriger une colonne ; je pars au galop, le sol me paraissant très uni, parce que le vent, en poussant la neige, avait comblé tous les fossés. Mais tout à coup mon cheval et moi enfonçons dans un grand ravin, ayant de la neige jusqu’au cou… Je tâchais de me tirer de cette espèce de gouffre, lorsque