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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/292

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

s’humilier et solliciter la paix auprès d’un petit gentilhomme corse, naguère sous-lieutenant d’artillerie, que ses talents, des circonstances heureuses et le courage des armées françaises avaient élevé au faîte du pouvoir et rendu l’arbitre des destinées de l’Europe !

Napoléon n’abusa pas de la position dans laquelle se trouvait l’empereur d’Autriche ; il fut affectueux et d’une politesse extrême, autant que nous pûmes en juger de la distance à laquelle se tenaient respectueusement les deux états-majors. Un armistice fut conclu entre les deux souverains, qui convinrent d’envoyer de part et d’autre des plénipotentiaires à Brünn, afin d’y négocier un traité de paix entre la France et l’Autriche. Les empereurs s’embrassèrent de nouveau en se séparant : celui d’Allemagne retourna à Nasiedlowitz, et Napoléon revint coucher au château d’Austerlitz. Il y passa deux jours, pendant lesquels il nous donna, au commandant Massy et à moi, notre audience de congé, en nous chargeant de raconter au maréchal Augereau ce que nous avions vu. L’Empereur nous remit en même temps des dépêches pour la cour de Bavière, qui était rentrée à Munich, et nous prévint que le maréchal Augereau avait quitté Bregenz et que nous le trouverions à Ulm. Nous regagnâmes Vienne, et nous continuâmes notre voyage en marchant nuit et jour, malgré la neige qui tombait à flocons.

Je n’entrerai ici dans aucun détail sur les changements politiques qui furent le résultat de la bataille d’Austerlitz et de la paix de Presbourg. L’Empereur s’était rendu à Vienne, puis à Munich, où il devait assister au mariage de son beau-fils, Eugène de Beauharnais, avec la fille du roi de Bavière. Il paraît que les dépêches que nous étions chargés de remettre à cette cour avaient trait à ce mariage, car nous y fûmes on ne peut mieux reçus. Nous ne restâmes néanmoins que quelques heures à Munich,