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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/321

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AUERSTÆDT.

porter lui-même. La bataille d’Iéna eut cela d’extraordinaire qu’elle fut double, si je puis m’exprimer ainsi, car ni l’armée française, ni celle de Prusse ne se trouvaient réunies devant Iéna. Chacune d’elles, séparée en deux parties, livra deux batailles différentes. En effet, pendant que l’Empereur débouchant d’Iéna à la tête des corps d’Augereau, de Lannes, de Soult, de Ney, de sa garde et de la cavalerie de Murat, battait, ainsi que je viens de l’expliquer, les corps prussiens du prince de Hohenlohe et du général Ruchel, le roi de Prusse, à la tête de son armée principale, commandée par le célèbre prince de Brunswick, les maréchaux Mollendorf et Kalkreuth, se rendant de Weimar à Naumbourg, avait couché au village d’Auerstædt, non loin des corps français de Bernadotte et de Davout, qui se trouvaient dans les villages de Naumbourg et alentour. Pour aller rejoindre l’Empereur du côté d’Apolda, dans les plaines au delà d’Iéna, Bernadotte et Davout devaient passer la Saale en avant de Naumbourg et traverser le défilé étroit et montueux de Kösen.

Bien que Davout pensât que le roi de Prusse et le gros de son armée étaient devant l’Empereur et ne les crût pas si près de lui à Auerstædt, ce guerrier vigilant s’empara la nuit du défilé de Kösen et de ses rampes escarpées, que le roi de Prusse et ses maréchaux avaient négligé de faire occuper, imitant en cela la faute qu’avait commise devant Iéna le prince de Holenlohe, en ne faisant pas garder le Landgrafenberg.

Les troupes de Bernadotte et de Davout réunies ne s’élevaient qu’à quarante-quatre mille hommes, tandis que le roi de Prusse en avait quatre-vingt mille à Auerstædt.

Dès le point du jour du 14, les deux maréchaux français connurent quelles forces supérieures ils allaient