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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/344

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MÉMOIRES DU GÉNÉRAL DE MARBOT.

Murat et les corps de Davout et d’Augereau. Celui-ci faisait tête de colonne. Le maréchal Lannes prit la direction de Pultusk. Il y eut ce jour-là quelques rencontres insignifiantes, les ennemis se retirant en toute hâte. Nous couchâmes au bivouac dans les bois.

Le 26, le 7e corps se remit à la poursuite des Russes. Nous étions à l’époque de l’année où les jours sont les plus courts, et dans cette partie de la Pologne, à la fin de décembre, la nuit commence vers deux heures et demie du soir. Elle était d’autant plus sombre, au moment où nous approchions de Golymin, qu’il tombait de la neige mêlée de pluie. Nous n’avions pas vu d’ennemis depuis le matin, lorsque, arrivés devant le village de Ruskowo, aux portes de Golymin, nos éclaireurs, apercevant dans l’obscurité une forte masse de troupes dont un marais les empêchait d’approcher, vinrent avertir le maréchal Augereau, qui ordonna au colonel Albert d’aller reconnaître ce corps à la tête de vingt-cinq chasseurs à cheval de son escorte, qu’il mit sous mon commandement. La mission était difficile, car nous étions dans une immense plaine rase, où l’on pouvait facilement s’égarer. Le terrain, déjà très boueux, était entrecoupé de marécages, que l’obscurité nous empochait de distinguer. Nous avançâmes donc avec précaution, et nous nous trouvâmes enfin à vingt-cinq pas d’une ligne de troupes. Nous crûmes d’abord que c’était le corps de Davout, que nous savions dans le voisinage ; mais personne ne répondant à nos Qui vive ? nous ne doutâmes plus que ce fussent des ennemis.

Cependant, pour en avoir une certitude plus complète, le colonel Albert m’ordonna d’envoyer un cavalier des mieux montés jusque sur la ligne que nous apercevions dans l’ombre. Je désignai pour cela un brigadier décoré nommé Schmit, homme d’un courage éprouvé. Ce brave,