Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/248

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Plus tard, le Var adopta Émile Olivier. L’homme au cœur léger était alors jeune avocat, très ardent républicain et irrésistiblement éloquent. Son père, Aristide, était connu comme un vieux démocrate. Son frère, officier, devait être tué en duel par un adversaire politique. Aussi, le jeune Émile jouissait-il d’une popularité immense. Un matin, il débarqua dans le petit village du Luc, dont mon grand-père fut longtemps le conseiller général. Traqué par la police, fuyant devant les mouchards, il venait demander asile. Mon grand-père, Charles Méric, lui donna un de ses costumes et le cacha, durant plusieurs semaines, dans sa maison. Il risquait gros, car il ne cessait de conspirer lui-même.

Singuliers retours de l’Histoire. Émile Olivier, qui s’était écrié : « Je serai le Spectre de l’Empire ! », devenait ministre libéral. Charles Méric, sorti de la forteresse de Belle-Isle, prenait le chemin de l’exil et se réfugiait à Livourne. Puis la guerre, la catastrophe. Émile Olivier, vomi par toute la France. Charles Méric, nommé député du Var, à une formidable majorité, et la Chambre des ruraux, flétrie par Crémieux, refusant, d’accord avec le gouvernement, de ratifier cette élection. Une veine, au fond, pour mon grand-père ; car, siégeant à la Chambre il se fût fait tuer pendant la Commune. C’était un de ces hommes dont le moule est à peu près perdu. Quelque temps après la chute de l’Empire, le vieux Blanqui, passant au Luc, fut acclamé par la population. Il parut sur le balcon de l’hôtel de ville et déclara brutalement :