Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maître. Elle brisait un poing tendu. Elle crevait un œil de haine. Elle faisait sauter des dents prêtes à mordre, aplatissait un ventre, coupait les jambes, tapait, cognait sautait, rebondissait, faisait le vide autour du poing qui la maniait, comme si elle eût été la roue même de l’infini animée par le bras du destin pour l’éternité.

« Et Libertad mourait, qu’elle tournait encore…

« Tel fut l’enseignement de la mort du sage. Il porta ses fruits superbement. Ceux que l’on appela les « bandits tragiques » furent les dignes fils de Libertad. En vérité, ils devaient être les bandits individualistes. »

Le morceau est joli, très joli, et d’un romantisme éclatant, sans déchets, qui dénote l’écrivain. Mais, hélas ! la réalité !…

D’autre part, Eugène Dieudonné, dans ses Souvenirs s’exprime ainsi sur Libertad :

« Libertad était populaire dans tout Paris. Il allait, les cheveux longs et tête nue. Nouveau Diogène, il parlait à tous, dès qu’un rassemblement se formait quelque part. Il avait la voix forte, mais avec un sens sérieux des nuances. Il savait prendre son auditoire.

« À Paris, plus qu’ailleurs, les réunions sont violentes. Il y a souvent pugilat. Libertad se jetait à terre sur le dos, et avec ses béquilles il faisait des moulinets terribles. Il est mort des suites d’une bagarre de ce genre. »

Mirage, faut-il le dire, mirage. La vérité est