Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/153

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en s’accompagnant au piano, savait parler de l’amour comme nul n’en a parlé. Il modifia, là-dessus, de fond en comble, les conceptions anarchistes telles que Libertad les avait fait accepter. Il faut dire que, du temps de Libertad, parurent des articles où l’on examinait très sérieusement la nécessité de la prostitution. On allait plus loin. On déclarait qu’il devenait utile de contracter des maladies vénériennes pour pouvoir les communiquer aux bourgeois et prendre sur eux la revanche de la contamination. Imitation de la belle Ferronnière qui se vengea ainsi de son royal amant. Ces sottises furent prises longtemps en considération. Grâce à Pierre D…, les anarchistes, revenus à des notions plus saines (c’est le cas de le dire) les balayèrent.

Une des gloires de l’individualisme de cette époque, ce fut le camarade Lorulot qui a évolué depuis, comme d’ailleurs tant d’autres. Lorulot avait débuté dans l’anarchisme, en qualité de colon à Saint-Germain. Cela en 1904 ou 1905. Ce fut une colonie inoubliable que celle de Saint-Germain qui comptait, parmi ses membres, Ernest Girault, alors un des purs de l’anarchie, maintenant un des purs du communisme, et Jean Goldsky. En principe, une colonie anarchiste, c’est une réunion de camarades, hommes et femmes, qui prétendent vivre librement, en marge de la Société. Ça commence par des appels à la solidarité, ça finit par des bagarres. Lucien Descaves a écrit, là-dessus une pièce de théâtre, La Clairière, qu’on n’a pas oubliée.