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CCXCIV

Paris, jeudi 4 avril 1867.

Chère amie, me voici enfin à Paris, mais plus mort que vif. Je ne vous ai pas écrit, parce que j’étais trop triste et que je n’avais que des choses douloureuses à vous dire de moi et de ce monde sublunaire. Vous me trouverez bien souffrant, mais bien heureux de vous voir. Vendredi matin, s’il faisait beau, nous pourrions faire ensemble une promenade au musée du Louvre. Je n’ose guère sortir, tant j’ai peur du froid, et on me recommande de marcher. Je vous envoie le huitième volume de M. Guizot, qui vous divertira. Le temps noir et triste me fait grand mal. J’espère que vous êtes toujours en grande prospérité. On raccommode ma maison et je suis réduit à vivre dans mon salon, qui est triste comme une prison. Venez me consoler. Vous emporterez tous les livres que vous voudrez, et je ne vous demanderai pas de me laisser un gage.

Adieu. À bientôt, j’espère.