Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/216

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et tout à l'heure je serai encore mieux.
DONAFRANCISCA : Chère amie, rends-moi encore un service, un service bien grand. Si tum'accordes ce que je vais te demander, j'accepterai l'argent que tu m'offres.
DONAMARIA : Parle.
DONAFRANCISCA : Le jardinier vient d'acheter un gros chien, pour garder ses oranges, à cequ'il dit. Cela contrarie fort nos rendez-vous. Prête-moi ta chambre pour cette nuit; elle donne surla petite cour; le mur est bas, facile à escalader. Nous avons une échelle de corde. Toi, tuoccuperas ma chambre, et tu auras mes livres pour te tenir compagnie.
DONAMARIA : C'est ma chambre qu'il te faut ?
DONAFRANCISCA : Oui, chère amie.
DONAMARIA : Elle sera ce soir à ton service.
DONAFRANCISCA :Que tu es bonne, chère Mariquita ! Nous qui bivouaquons toutes les nuits,comme nous allons être bien dans ta belle chambre à alcôve !
DONAMARIA : Est-ce là tout ce que tu veux ?
DONAFRANCISCA : Tu es un ange ! — Ah ! ce verre de limonade, le bois-tu en entier ?
DONAMARIA : Le veux-tu aussi ?
DONAFRANCISCA : II est si grand. Laisse-m'en boire la moitié; je meurs de chaud.
DONAMARIA : Bois, et grand bien te fasse !
DONAFRANCISCA : Je bois la première, tu vas savoir ma pensée.
Elle boit.
DONAMARIA, à part : Tu sauras la mienne aussi.
DONAFRANCISCA, jetant ce qui reste dans le verre : Ah ! quel goût affreux !... Qu'y a-t-ildonc dans cette limonade?... Ah ! quelle horreur ! J'en ai la gorge brûlée... Mais qu'as-tu donc !pourquoi pleures-tu en me regardant?... tu trembles... O ciel ! je brûle... Mon Dieu !... que m'as-tufait boire!... Réponds-moi donc!...... Maria... Ah!... j'étouffe, je brûle... De l'eau! donne-moi del'eau !
DONAMARIA : Malheureuse ! qu'ai-je fait ? Au secours ! au secours !
DONAFRANCISCA : Ah ! je me meurs !