Page:Méry - Monsieur Auguste, 1867.djvu/201

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
197
MONSIEUR AUGUSTE

ment, personne ne m’accordera ma grâce, à moi qui suis innocent. Cet entretien fiévreux que nous avons me surexcite et me fait vivre en apparence. Mais quand je n’aurai plus devant moi un homme comme vous, mystérieux et fatal ; une apparition qui me donne en plein jour les âpres sensations des mauvais rêves, je vais retomber dans un désespoir mortel… Voyez tomber le soleil à travers l’éclaircie de ces arbres… Eh bien ! à mesure que je lui vois descendre un échelon de ces rameaux, un bec de vautour m’arrache un lambeau du cœur, et quand le soleil aura disparu, le cœur tout entier sera dévoré… Un ange de beauté donnant des sourires à un homme !… Un mari, un maître revêtu d’un pouvoir formidable… Une épouse soumise comme une esclave… Des yeux ardents qui ne rencontrent plus de voiles… Des caresses qui donnent l’extase… Des révélations qui éblouissent… Des voluptés qui n’ont pas même de nom, dans la langue du bonheur !… Oh ! je suis fou !… la nuit va venir ; elle est intolérable la jalousie qui tombe des étoiles ? non, non, je ne verrai pas le soleil de demain.

Octave se laissa tomber sur le gazon, en plongeant ses mains convulsives dans ses cheveux dévastés.

— Pauvre jeune homme ! dit Simaï ému, et