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MONSIEUR AUGUSTE

— Je veux ce que voudra ma destinée.

— Quant à moi, je suis tout réconcilié avec vous, mais si vous tenez à vous venger du soufflet que j’ai reçu, allons chercher les deux hussards. Vous pouviez me livrer à la justice, vous ne l’avez pas fait ! vous pouviez me tuer, pour mettre de votre côté les chances favorables de votre duel, ici, dans ce bois désert, et vous avez laissé vivre celui qui peut vous donner la mort dans un instant… Tenez, monsieur Octave, je suis un être profondément dégradé… Quand les bons instincts me reviennent, je rougis de moi-même, et il ne me reste plus la moindre goutte de venin au fond du cœur. J’ai assisté plusieurs fois à l’exécution des grands criminels… Ces hommes dont la vie fut faite de crimes affreux… Eh bien !… en écoutant une bonne parole, au moment de l’agonie, ils pleuraient comme des enfants, et redevenaient honnêtes. Si on leur eût fait grâce, ils auraient bien vécu… L’homme n’est pas si mauvais qu’on le croit… Les plus pervertis gardent toujours un souvenir de l’alcôve de leur mère, et ce souvenir suffit pour réveiller les remords et préparer le repentir… Voulez-vous me faire grâce sur l’échafaud ?

— Moi, monsieur !… mais si vous n’exigez rien, vous, je n’ai plus rien à vous demander… Seule-