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MONSIEUR AUGUSTE

mademoiselle, ne me forcez pas aux explications… Pourquoi n’y a-t-il pas de médecins femmes pour les jeunes femmes ?… Un homme a toute sorte de droit de curiosité sacrilège, sous prétexte de maladie !… C’est révoltant !… la sainte pudeur est violée pour une migraine !… Louise n’avait pas besoin de médecin. L’été guérit tout. Le soleil est le vrai docteur. Cet homme n’a pas le droit de toucher à un cheveu de cette jeune fille. Mon sang brûle et se glace en songeant… Oui, oui, je suis fou, mais je sens que ma folie raisonne juste, et que demain les yeux de cet homme cesseront de voir ce qu’ils auront vu. Alors, la respiration me reviendra au cœur. L’haleine de la vie me manque en plein air !… Il y est ! il y est encore en ce moment ! il y est toujours ! Le spectacle lui plaît ! Oh ! c’est intolérable ! Je vais l’attendre… Mais ne vous effrayez point, mademoiselle ; je respecte la maison ; il n’y aura point de scandale, point de bruit. Tous les matins, il va faire sa promenade au bord de l’eau. C’est là que nous nous rencontrerons, demain. Je l’attendrai toute la nuit.

— Il le fera comme il le dit, murmura Rose.

Agnès comprit que tout raisonnement était inutile, et qu’il fallait venir en aide à cet intraitable désespoir, qui, d’ailleurs, prenait sa source dans