Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne leva hors du sol, pas une fleur ne se montra sur les arbres, et il sembla que toute chose mortelle dût bientôt mourir. Vaguant devant elle dans cette agonie, elle vint, enfin, à Éleusis et s’assit près d’une fontaine, où elle fut saluée avec bonté par les filles du roi Kéléos, alors que celles-ci s’apprêtaient à tirer de l’eau, et, sur leur prière, élut domicile dans leur maison. Son mal ne se modéra pas. Pendant un séjour d’une année à Éleusis, la terre partagea encore le chagrin de Déméter, et ne donna aucun fruit, Cette mère affligée récompensa du moins les bontés qu’elle reçut dans la maison de Kéléos, et on raconte à ce sujet plus d’une histoire. L’une veut que la déesse ait nourri Démophoon, fils de Kéléos ; l’enfant, par ses soins, devint d’une beauté glorieuse, baigne chaque jour dans le feu pour le rendre immortel. Sa mère, Métanéira, le voyant dans le bain de flammes, cria de peur ; et Déméter lui dit que, sans ses cris, ce fils n’aurait connu ni la vieillesse ni la mort, tandis que maintenant il devait vieillir et mourir comme les autres hommes. Autre conte ou nouvelle version : il paraîtrait que, lors du cri d’alarme que jeta Métanéira, Déméter permit que les flammes consumassent l’enfant Démophoon ; mais qu’en compensation elle donna au frère de la victime, Triptolème, un chariot traîné par des dragons ailés et lui apprît à labourer la terre et à semer le froment. Continuons à suivre la voyageuse dans sa course. La sécheresse terrible et la famine causées par la colère de Déméter convainquirent Zeus que tout mourrait sur terre s’il ne calmait la peine de la déesse. Celle-ci ne voulait entendre aucune prière que sa fille ne lui fût rendue ; et Zeus envoya enfin Hermès,