Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/64

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licite, Florence l’obtiendra. « Je ne veux pas jouer demain », répète l’artiste. Florence plaide en vain sa cause. Il va se retirer, quand soudain, avec l’accent du désespoir, il s’écrie :

— En vérité, madame, vous êtes sans pitié ! m’obliger, à l’heure qu’il est, d’aller faire réveiller Mme Petit pour la conjurer de vous doubler demain dans la Mère coupable ! C’est une barbarie, car elle est souffrante aussi, et pourtant, elle jouera, j’en suis sûr. Elle est si bonne camarade !

À mi-voix, Vigée dit à Sophie Gay :

— Faites attention : la scène commence.

En effet, Mlle Contat se radoucit. Pourquoi ne ferait-on pas relâche ? Non : on ne peut sacrifier une recette. Le vicomte de Ségur a bien vu l’effet produit par le nom de Mme Petit. Il blâme Mlle Contat de résister aux prières de ses camarades et aux vœux du public. On l’approuve, et Mlle Contat, charmée de se voir contrainte à faire ce qu’elle désirait, rappelle Florence :

— Puisqu’on le veut absolument, je jouerai demain le Misanthrope et les Fausses Confidences[1].

À partir de ce jour, les relations se nouent entre Sophie Gay et la comédienne. Mlle Georges nous en apporte l’écho, et ajoute quelques touches au tableau précédent : Mlle Contat, « toute grande dame qu’elle est », a accepté du Gouvernement un pavillon près de l’Odéon. Le pavillon est vilain, la salle à manger vilaine, le salon inexistant ; elle reçoit dans sa chambre à coucher… mais elle est logée pour rien.

  1. Sophie Gay : Salons célèbres, p. 69.